""""Annie
A Mr Francis Adolphe
Maire de Carpentras
Saint Didier le 15 octobre 2015
Monsieur
le Maire,
Je suis Issue
d’une vieille famille carpentrassienne (que vous connaissez bien : je suis
la petite fille de ......., chef d’orchestre carpentrassien, et la nièce
de....... et comme beaucoup d’autres je reste très attachée à Carpentras,
ma ville de naissance.
Je me permets de
vous écrire pour vous faire part de la crainte que j’ai, et qui est partagée
par de nombreux carpentrassiens, de voir disparaitre la Maison de la Presse de
Mr et Mme Salesses à l’entrée de la rue de la République, le seul magasin de la
ville à être ouvert tous les jours. Cette grande, belle et très bien pourvue
librairie/papeterie draine de nombreux clients de Carpentras et du Comtat Venaissin
attirés par l’amour des livres, de la culture et de la connaissance ou plus
prosaïquement venant y trouver leurs quotidiens et hebdomadaires préférés ou
livres de classe pour leurs enfants à la rentrée des classes. De plus cet
établissement attire aussi l’été de nombreux touristes étrangers y trouvant la
presse internationale qui les intéresse, et qu’il serait impossible de trouver
autre part dans un rayon de 20 kms. Ce magasin, grâce au dévouement de ses
propriétaires, est une institution locale et le passage y est constant et dense
tous les jours de la semaine. Idéalement placé à l’entrée de la rue de la
République et près de nombreux parkings. Il est une invitation à entrer dans le
centre-ville à la découverte d’autres magasins. Sa disparition, qui est
maintenant programmée, serait, de mon point de vue, une catastrophe pour la
ville et sa capacité à faire venir les gens dans un centre-ville ou la
nécessité d’une circulation piétonnière est déjà un obstacle sérieux au
développement des commerces locaux. Non seulement ceci priverait nos
concitoyens d’accéder au monde du livre et de l’édition mais je suis persuadé
que les autres commerçants pâtiraient aussi de cette disparition, susceptible
de réduire le flot piéton vers le centre-ville.
A plus de 70 ans, Mr et Mme
Salesses ont largement atteint l’âge d’une retraite méritée et seule la passion
de leur métier les fait continuer malgré la fatigue, le stress et des horaires
délirants et irraisonnables à cet âge (avec des journées qui commencent tous
les jours à 5hr du matin !). Dans ces conditions le moindre accident de
santé est dramatique et aux conséquences de plus en plus difficiles à gérer. Ca
fait donc quelque temps déjà que Mr et Mme Salesses essaient de vendre leur magasin,
à ce jour sans succès. Il faut avoir les reins solides pour racheter une telle
affaire avec un stock permanent très important. De plus il est connu que le
monde de l’édition est une industrie qui souffre face à internet, les livres
électroniques et la concurrence de mastodontes tels qu’Amazon. Dans ces
conditions les candidats au rachat sont rares…
En l’absence d’une
option sérieuse de vendre leur affaire, je crois savoir que Mr et Mme Salesses
envisagent de stopper purement et simplement leurs activités au début de
l’année prochaine, confirmant la catastrophe dont je parlais au début de ma
lettre. La présence d’une Maison de la Presse rue la République s’arrêterait
alors après 77 ans d’existence (le père de Mr Salesses ayant créé cette
librairie en 1938) et en mettant au chômage les 7 employés de cette maison,
victime collatérales de cette situation…
Bien qu’il s’agisse
d’une affaire strictement privée, l’impact qu’elle risque d’avoir sur nos concitoyens
et sur l’activité de la ville me semble suffisamment important pour que la
mairie s’en émeuve. Pour le moins, cette lettre servira à vous informer de
l’évolution de cette situation si vous l’ignoriez. Dans tous les cas, il me
semble important que la mairie s’investisse pour aider à trouver une solution à
ce problème et maintenir l’attrait de Carpentras et de son centre-ville. Ceci
étant dit, je ne sais pas trop ce que vous pouvez faire, n’étant pas familière
avec les ressources d’une municipalité comme Carpentras devant un tel défi.
Mais, je ne doute pas qu’il y ait des pistes à envisager qui ne l’ont pas
encore été…
Pour commencer
peut-être que la mairie pourrait faire des propositions pour attirer et
faciliter la venue d’un repreneur éventuel : on voit bien des
municipalités aider de nouveaux commerçants à s’installer dans leur commune, on
pourrait tout aussi bien imaginer que d’autres aident à empêcher la fermeture
de certaines activités jugées vitales pour la leur… Peut-être que la mairie,
par son tissu relationnel, pourrait suggérer de nouvelles pistes pour une
reprise de ce commerce ou identifier une gérance solvable. Peut-être aussi que
la mairie pourrait envisager des facilités (immobilières, fiscales,
contractuelles ou autres) pour attirer de possibles repreneurs. Peut-être
également que Mr Jean François Delmas, le conservateur en chef de la
Bibliothèque Inguimbertine, au moment où celle-ci va déménager à l’Hôtel Dieu
pour devenir une bibliothèque-musée au concept très original, a lui aussi un
tissu relationnel intéressant et des idées pour maintenir une activité
commerciale livresque majeure à Carpentras. Son activité exceptionnelle pour
promouvoir les activités culturelles de Carpentras en fait certainement un interlocuteur
privilégié.
Ce ne sont que quelques
suggestions, je suis sûr que vous, et vos collègues de la mairie, pouvez en
imaginer d’autres, qui éviteraient de devoir fermer cet établissement
emblématique de la ville.
Veuillez croire Monsieur le Maire, à
l’assurance de mes salutations distinguées,
Annie M
Cc Mr Julien Aubert, député de la 5 ème
circonscription de Carpentras
Mme Marion Maréchal-Le Pen, députée de la 3 ème circonscription de
Carpentras
Mr Jean Francois Delmas, conservateur en chef de la Bibliothèque
Inguimbertine
Mme Karine Guez, déléguée au développement des commerces, mairie de
Carpentras
PS : J’ai
partagé cette lettre avec un certain nombre d’amis et de connaissances de
Carpentras qui sont aussi d’avis que tout doit être fait pour éviter la
fermeture de la Maison de la Presse de Carpentras.